lundi 16 janvier 2012

AXA, BNP, Crédit Agricole, Société Générale : comment faire (aussi) du fric avec le blé….

Cocorico! Si la France a perdu son triple A, ses banques et assurances profitent bien de la hausse des cours mondiaux des denrées alimentaires. Qui a dit famine? Malpoli va!


A en juger par le dernier rapport de l’ONG des Amis de la Terre (à télécharger en fin d'article) Il n’y a pas que les ardoises sur les dettes souveraines dans la vie des institutions financières. L’ingénierie financière a aussi su trouver un exutoire du côté des matières premières agricole et des investissements spéculatifs dans l’acquisition (l’ONG parle « d’appropriation ») de terres cultivables.

Le sous-titre du rapport (« l’argent de la ferme : comment les banques européennes et la finance privée profitent de la spéculation sur la nourriture et des appropriations de terres – votre argent alimente-t-il la pauvreté ») plante joliment le décor. 

L’étude, qui consiste à mettre en lumière l’activité de 29 institutions financières européennes en direction de l’agriculture, est à la fois passionnante et assez convaincante :

« Avec la crise qui secoue les marchés financiers, les instruments financiers basés sur des matières premières agricoles deviennent de plus en plus attractifs pour les investisseurs et les spéculateurs. Des milliards d’euros et de dollars sont injectés dans les marchés de matières premières, à l’origine de soudaines variations des prix observés sur les marchés mondiaux de matières premières alimentaires, provoquant des hausses supportées par les consommateurs. 

Quand la spéculation 
engendre la famine

Les prix alimentaires élevés frappent d’abord les plus modestes, menaçant progressivement le droit à se nourrir. Mais les variations brutales des cours affectent également les exploitants agricoles les plus pauvres, mettant leurs exploitations en péril et leur rendant plus difficile le maintien d’un revenu prévisible…les spéculateurs dominent aujourd’hui les marchés de matières premières agricoles tels le blé, aujourd’hui détenu à 60% par la finance contre 12% il y 15 ans….Au cours des 5 dernières années, les actifs détenus par les spéculateurs sur ces marchés ont pratiquement doublé, passant de 65 milliards de dollars en 2006 à 126 milliards de dollars en 2001 ».

Après avoir décrit le lien entre volatilité des prix, faim et pauvreté et mis en évidence, l’impact de la production des agro-carburants (à l’origine depuis 2001 de près de 70% de la demande supplémentaire de maïs, de 13% de celle de blé, de 90% de celle de colza, de 47% de celle d’huile de soja et de 22% de la demande supplémentaire d’huile de palme !) les Amis de la Terre s’attaquent aux présumés responsables.


La terre ne ment pas aux traders

Tradition agricole française oblige, l’activité d’AXA, BNP, Crédit Agricole et Société Générale, exploitants agricoles méconnus, est passée en revue.

AXA, qui finance l’agriculture et la sylviculture en Asie et en Amérique Latine, ne fait pas mystère sur son site Internet, des opportunités d’investissement alimentaires pour profiter de la « demande choc » en particulier en Chine et en Inde. L’assureur a également mis quelques billes dans Lankom, un support d’investissement basé à l’Ile de Man qui aurait planté ses choux en Ukraine…

BNP Paribas serait, aux dires des Amis de la Terre, l’une des banques les plus actives dans les dérivés de matières premières, générant environ 500 millions de dollars par an de revenu. La banque affirme qu’à Novembre 2011, BNP IP (Investment Partners, sa filiale dédiée à l’Asset management) avait une exposition globale sur des matières premières agricoles de 648 millions d’euros (706 millions en y ajoutant le bétail) au travers de divers fonds d’investissement, soit 0,12%  des 540 milliards d’euros qui lui ont été confiés en gestion par ses clients. Des queues de cerises pour rester dans la métaphore champêtre. 

Bien qu’il existerait des preuves du contraire aux dires des Amis de la Terre, la banque se défend de se livrer à des opérations pour son propre compte.

Comme son nom l'indique, le Crédit Agricole a une relation très ancienne avec la terre nourricière. Son activité de gestion d'actifs, qu'elle conduit en partenariat (75%) avec la Société Générale (25%) au travers d'Amundi, fait une place modeste à son fonds Amundi EFT Commodities S&P GSCI Agriculture (97,66 millions de dollars investis à la date de fin juillet 2011). 

La Banque Verte propose également à ses clients, le « minuscule » (4,76 millions de dollars d’actif au 31/10/2011) fonds Amundi ETF Commodities S&P GSCI Non-Energy, lequel réplique l’indice S&P GSCI Non-Energy Total Return Index, dont 64% des actifs sont investis dans du cheptel et des matières premières.

C’est son fonds Amundi Funds Global Agriculture ouvert en mars 2008, qui procède aux achats fonciers par le truchement de ses participations dans des entreprises asiatiques (30,3%) nord américaines (29,2%) et des pays dits « émergents » (9%) le tout représentant 122,1 millions de dollars gérés à fin juin 2010. Certaines des entreprises du portefeuille auraient été impliquées dans des acquisitions « sauvages » de terres façon Wild West…  


Echaudée en Grèce, la Société Générale, par l’intermédiaire de sa filiale Lyxor Asset Management, propose à sa clientèle, plusieurs fonds opérant dans le négoce de matières premières :

Lyxor ETF Commodities CR qui a investi 815 millions d’euros (au 8 juillet 2011) dans des matières premières dont 43% de bétail et de denrées agricoles,
Lyxor ETF Commodities CRB Non-Energy : 253 millions d’euros à la même date dont 67% en matières premières agricoles et en bétail,
SGI Smart Market Neutral Commodity qui spécule dans 3 secteurs liés aux matières premières et dont 30% des actifs portent sur l’agriculture.

En octobre 2009, Dylan Grice, analyste-maison résumait ainsi la situation à l’attention des clients de la banque : « les entreprises agricoles offrent une opportunité aux investisseurs qui pensent que la demande globale de nourriture va augmenter dans les années à venir, contribuant à accroire la valeur des matières premières agricoles et des terres cultivables. Les entreprises agricoles constituent le moyen le plus sûr pour permettre aux investisseurs d’en bénéficier… »

La meilleure preuve que le flouze et le blé font bon ménage réside dans l’utilisation quasi généralisée par tous ces gentlemen farmers d’un nouveau genre, du très prisé indice Standard & Poor’s GSCI (anciennement Goldman Sachs Commodity Index) pour surveiller l’évolution des cours…

Standard & Poors ; décidément, on en sort pas…



Fichier attaché: 
farming-money.pdf            

Source: Bakchich info

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