Les crises mondialisées ou les dictatures enracinées s’éradiquent dans les rues, sur les champs de bataille, ou par mort clinique des systèmes oppresseurs (dogme soviétique) ou des dictateurs en poste (Franco).

Un scénario politique facile à prévoir

Le scénario qui suivra la présente élection n’est pas très difficile à imaginer. L’histoire, là encore, est riche d’enseignements. Pour Nicolas Sarkozy, inféodé au système jusqu’à la caricature, nous avons cinq pénibles années de décadence sociale et de désolations ininterrompues au bilan pour deviner ce qui suivrait.
Pas mieux pour François Hollande, personnage politique falot, riche en formules creuses, dans un bloc obstinément réformiste, sans aucun projet sérieux, sinon de s’appuyer en dépit du bon sens sur un système condamné, et n’ayant pour unique perspective que le mirage d’une croissance ressuscitée.
Miracle bien évidemment impossible. Et il ne se finira pas une année sans que la popularité du candidat “du changement” (encore un !) ne dégringole vertigineusement face aux mesures d’austérité draconiennes qu’il sera contraint de prendre sous la pression “amicale” de l’infernale Troïka.

Mélenchon lui-même…

Poussons plus loin l’analyse : Mélenchon lui-même n’aurait pas été en capacité d’appliquer son programme en s’appuyant sur la seule surprise des urnes. “Ils” — les tenants du système — l’auraient tué sans hésitation. Politiquement ou même physiquement. Comme ils ont tué Jaurès, le chilien Allende, le tchécoslovaque Dubček
Mais alors, l’expression démocratique ? Ne tombons pas dans l’outrance des “élections, pièges à cons”. Ce n’est pas vrai. La consultation électorale est un moyen tout à fait acceptable pour gérer et équilibrer des situations relativement saines.
Mais que ces situations en viennent à se pourrir, et la raison cède la place aux pulsions mauvaises et régressives : le vote Le Pen, bien sûr… mais aussi ce vote utile qui consiste à repousser des échéances dramatiques qu’on sait confusément inéluctables. Et qu’on pourrait décrire en paraphrasant la célèbre citation de Churchill sur la guerre :
« Vous avez voulu éviter le pire au prix du médiocre. Vous avez le médiocre et vous aurez le pire. »

Imprévisible rue

La rue, donc… Mais calmons de suite la joie des chantres du Grand soir et des soulèvements populaires mûrement et politiquement réfléchis. Le soulèvement populaire procède lui aussi bien moins d’une volonté rationnelle ou d’une réflexion politique que de l’expression impulsive d’une exaspération devenue insupportable.
Comme lors des révolutions arabes de l’an passé. Comme lors de ces divers mouvements d’Indignés qui ne furent que les prémisses encore embryonnaires d’une colère de moins en moins refoulable.
Mais les mouvements de rue ont ceci de commun qu’ils sont totalement imprévisibles quant à leur issue.  Révolution façon 1789, 1936, 1968… ou simple remplacement d’une dictature par un système tout aussi oppressif ; révolutions pacifiques (la “révolution des œillets” au Portugal) ou guerres, civiles ou militaires, sachant que les secondes font autant de victimes innocentes que les premières.

La rue, ça ne se déclenche pas, ça se prépare

Libre aux esprits terrorisés de préférer la dénégation, le repli peureux sur soi, le repoussoir stérile des échéances douloureuses. Mais il est clair que la crise actuelle, dite de “la Grande perdition”, nous conduit tout droit à une de ces heureuses ou sombres destinées.
Pas trente-six-mille manières d’affronter toutes ces éventualités. La rue, ça ne se déclenche pas, ça se prépare. Tel fut le sens de mon engagement auprès de Jean-Luc Mélenchon : un programme structuré, la reconnaissance d’une réalité même cruelle et désobligeante, autant de supports précieux pour canaliser et offrir une issue acceptable à l’inévitable future explosion populaire.
Rappelons-nous juste pour terminer cette réalité elle aussi historique : de par la capacité des organisations progressistes à exprimer les mécontentements populaires, c’est pendant ces périodes de crises aiguës que virent le jour les plus grandes avancées sociales.