lundi 8 août 2011

Démocratie, réveille toi, ils sont devenus fous !



Les agences de notation secouent depuis quelques jours la planète finance... Mais d'où tiennent-elle leur pouvoir ? André Bellon en appelle à un réveil en sursaut de la démocratie, pour ne plus aller de crise en crise



De crise boursière  en crise boursière, le temps s’écoule, emportant avec lui les emplois, le pouvoir d’achat, la démocratie. Les agences de notation – qui sont-elles ? de qui tiennent-elles leur pouvoir exorbitant ?– notent avec enthousiasme tous ceux qui accentuent la crise sociale, les encourageant à avaler toujours plus des médicaments qui tuent, martyrisent leurs travailleurs, détruisent leurs services publics. Dans cette immense braderie, les États –faut-il encore les appeler ainsi ?- ne sont plus que les commis de la bourse. Les citoyens sont sommés de s’incliner devant les nécessités économiques, entendez par là les contraintes imposées par les marchés financiers. 

Bien sûr, à chaque étape, de  grands esprits expliquent qu’on l’a échappé belle, que les marchés se rétablissent. À quel prix social ? Mais il apparaît aujourd’hui nettement que chaque crise ne fait que préparer la suivante,  que le scénario est sans fin, que les remèdes proposés coûtent socialement de plus en plus cher et que la thérapie est de plus en plus temporaire.

Que s’est-il passé ces derniers jours qui a conduit tant de thuriféraires du système, du Figaro aux Échos, de la gauche à la droite, à dénoncer la dictature des marchés dont ils étaient jusqu’alors de serviles propagandistes ? C’est que, soudain, le monstre s’est attaqué aux piliers mêmes de la société qui en était le géniteur, notamment les Etats-Unis. Du coup, plus personne n’est à l’abri. L’économie mondiale s’écroule en révélant son irréalité, les équilibres géopolitiques se bouleversent en renversant les États qui jusqu’alors, en étaient les garants.
 
L’équation à résoudre est délicate pour les responsables politiques et économiques. Car il n’est apparemment pas question pour eux de remettre fondamentalement en cause un système qu’ils ont eux-mêmes bâti. Pour l’instant, ils s’affligent en chœur des conséquences tout en continuant de s’accommoder des causes. Il est, en effet, paradoxal de parler d’intervenir après des décennies pendant lesquelles le seul mot d’ordre fut la dérégulation, alors que les États eux-mêmes ont été  dépossédés des moyens de contrôle qu’ils détenaient, leurs représentants estimant – naïfs ou cyniques – que le libre marché trouverait lui-même des équilibres favorables à la prospérité. On sait aujourd’hui qu’il n’en est rien.

Car la politique lancée dans les années 1980-1990 a consisté à rendre la vie publique dépendante de forces lointaines, incontrôlables, à mettre les prédateurs financiers aux commandes de l’humanité. Certes, le capitalisme est fondé sur l’actionnariat, mais c’est tout récemment que les actions sont devenues essentiellement des objets de spéculation plus que des moyens de financement des entreprises. Certains rares économistes dits de droite et certains grands capitaines d’industrie en dénoncent les perversités et, déjà, dans les années 1930, des penseurs tels que John Maynard Keynes avaient demandé que des règles strictes encadrent les marchés boursiers pour éviter de tels dérapages.

La spéculation mondialisée rend inopérante toute politique publique. Dans ce contexte, ce qu’on appelle officiellement crise reflète les désarrois ou les aspirations des spéculateurs, jamais les difficultés des citoyens. Or, dans toute vision humaniste, ce sont les citoyens qui doivent être l’objet de l’attention des responsables politiques. Il faut donc enfin inverser la logique infernale. Le contrôle de la spéculation est un objectif indispensable à toute sortie de crise. La classe dirigeante actuelle, trop exigüe et trop liée à la logique financière, ne peut évidemment s’opposer à ces intérêts. Seule une force authentiquement démocratique est susceptible de faire barrage  et d’imposer à des marchés devenus fous, des solutions par définition politiques, et c’est sur elle que les classes dirigeantes réformatrices devront s’appuyer.
C’est pourquoi la souveraineté populaire est au cœur de tout projet de transformation. C’est pourquoi le concept de peuple, si décrié par les porte paroles officiels du système doit être remis en avant.  L’élection d’une Assemblée Constituante est un moyen indispensable de cette rénovation. Faute de quoi, de crise en crise, d’aveuglement en aveuglement, de démission en démission, c’est une sorte de barbarie qui se profile pour l’humanité.


André Bellon, président de l’Association pour une Constituante

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