L’état d’une démocratie se mesure d’abord à la qualité de son débat public, à la liberté d’esprit qu’il y règne, à la capacité de ses dirigeants à oser et à assumer de réelles confrontations. Le torrent de boue soulevé par les propos plutôt anodins d’Eva Joly sur le 14 Juillet en dit long sur les régressions françaises après quatre ans de sarkozysme. Non contente d’avoir balayé un rival trop sûr de lui, la candidate officielle des écologistes a réussi, le jour de la fête nationale, une entrée en fanfare dans la campagne : osant affirmer préférer un défilé citoyen à une parade militaire - quelle audace ! -, elle a réveillé les pires démons. Eva Joly ? «Pas Française !», a tranché en substance un François Fillon que l’on a connu plus inspiré et qui a décroché, hier, la palme de l’indécence en s’aventurant sur le terrain de la binationalité. Pour les ténors de l’UMP, cette «dame» incarne «l’anti-France» et «l’esprit munichois». Elle«insulte», selon les mots d’Henri Guaino, conseiller du président de la République, «tous ceux qui depuis des siècles meurent pour ce pays». On demeure interdit devant tant d’outrance, d’intolérance et d’arguments nauséabonds.
Même à gauche, plusieurs candidats socialistes - Manuel Valls et Ségolène Royal en tête - n’ont pas perdu de temps pour prendre leurs distances avec «l’extrémiste Joly» qui a manifestement franchi les limites du «politiquement correct» que souhaite imposer une certaine gauche. D’autres se sont réfugiés dans un silence gêné et peu glorieux.
La qualité du débat public dans notre pays a atteint la cote d’alerte. C’est le mérite paradoxal d’Eva Joly, fausse ingénue de la politique française, que de l’avoir démontré, en trois petites phrases.                            Source: Vincent Giret  Libération
 
 
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire